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Trois questions à Alexa Conradi, présidente de la Fédération des Femmes du Québec

Des cérémonies sont organisées ce week end à Montréal pour commémorer les 20 ans de la tuerie de Polytechnique. Des conférences et des rassemblements pour se souvenir, et pour faire le point sur l'égalité des sexes aujourd'hui au Québec. Dans les textes, la femme est l'égale de l'homme. Dans la pratique, c'est un peu plus compliqué.
Vu de France, avec "Ni Putes Ni Soumises" ou les "Chiennes de garde", la province du Québec fait l'effet d'un endroit très avancé sur cette question.

- TM : On peut avoir l'impression que tout est réglé ici... Est-ce le cas?
- Alexa Conradi : C'est vrai qu'on a fait des avancées importantes depuis 50 ans. Le mouvement féministe a réussi à faire bouger les choses en matière de droit notamment. C'est vraiment au plan légal que nous avons atteint l'égalité. Mais dans les faits, il y a encore des éléments systémiques qui jouent contre nous. Que ce soit la violence faite aux femmes, l'inégalité des salaires, la possession de la richesse ou l'accès à des postes de pouvoir, il y a encore énormément de thématiques sur lesquelles nous devons parvenir à l'égalité.
- TM : Est-ce que croire que tout est réglé rend ce combat plus difficile?
- AC : Tout a fait. Lorsqu'on entend régulièrement "Mesdames ça suffit, vous avez atteint l'égalité, pourquoi est-ce que les féministes existent encore?" Eh bien ça nous place dans une position où nous avons à défendre le fait d'exister, avant de pouvoir discuter des enjeux concrets sur lesquels nous travaillons. C'est un discours qui banalise les réalités qui existent encore et nous sommes loin d'être une société égalitaire accomplie. Dans certains pays du monde, il n'y a pas de législation qui protège les droits des femmes, mais les racines des problèmes sont souvent similaires. C'est vrai qu'il y a des situations très graves pour les femmes dans le monde, mais ça ne veut pas dire que parce que c'est grave ailleurs, il ne faut pas reconnaître les problèmes qui existent ici.
- TM : Qu'est ce qui reste à faire au Canada?
- AC : Nous n'avons pas une grande revendication, comme à l'époque où nous demandions le droit de vote. Aujourd'hui, il faut préciser les choses. Pour régler le problème de la violence faite aux femmes, on a besoin d'un changement de mentalité. Lorsqu'on parle par exemple de violences conjugales et homicides, de ne pas parler de "drame familial", mais de le nommer comme une violence faite aux femmes. Ça, ce serait un bon départ. On a aussi besoin de questionner les publicités sexistes, qui provoquent chez les femmes une haine de leur corps et parfois un sentiment d'infériorité. La lutte contre la pauvreté aussi, ce sont les femmes qui travaillent en bas de l'échelle. Il faudrait augmenter le salaire minimum. Il faut aussi s'attaquer à l'exclusion des femmes immigrantes sur le marché du travail : 30% d'entre elles occupent des postes qui ne correspondent pas à leur niveau d'éducation.
Autant dire qu'il y a encore beaucoup de travail.

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